lundi 28 janvier 2008

Des transports publics et de l’humanité de tous les jours


On the bus (2)
Mise en ligne par COLIИ
Je fréquente beaucoup les transports en commun et ce depuis bien des années, par souci écologique d’abord et puis un peu par curiosité ethnologique. Les bus, les métros, les trams, les skytrains et autres seabus sont autant de concentrés d’humanité.

Ainsi certain bus qui dessert le Downtown Eastside est un étonnant raccourci de la faune vancouvérite, on y croise des prostituées migrant vers leur bout de trottoir, coh
abitant harmonieusement avec des “ executive women” en tailleur et attaché-case, en route pour les hautes tours de verre du centre-ville. On y croise aussi des hippies sur le retour et des jeunes hip-hop, équipés de chevelures, de casques audio et de pantalons surdimensionnés, des étudiantes qui se remaquillent après une nuit d’insomnie et des junkies fatigués de vivre. Chacun se laisse porter vers sa destination, dans cette étrange capsule d’intimité momentanée. Ils laissent tous, à leur insu, deviner un petit bout de leur existence.

Ce qui est curieux c’est qu’avec le temps ces passagers en viennent à se sentir si complètement à l’aise dans le bus qu’ils y poursuivent le cours de leur existence sans prêter attention a ceux qui les entourent. Comme ce couple de jeunes, visiblement fatigués, endormis enlacés à l’arrière du 250 en direction de Horseshoe Bay ou comme cette jeune femme cro
isée ce soir : elle papotait joyeusement au téléphone en français, visiblement persuadée que personne ne la comprenait. En quelques 20 minutes j’ai ainsi appris qu’elle vivait avec un Autrichien (Paul) avec qui elle allait se marier en août, une cérémonie civile en Autriche le 8 et une religieuse en France le 30 (mais chut c’est encore secret!), qu’elle hésitait à aller passer son voyage de noces à Maurice (quand j’vous dis que le monde est petit !), ou en Tunisie ou encore au Népal (ce qui enchanterait apparemment son amoureux), et qu’elle ne savait pas comment gérer ses parents qui voulait inviter plein de monde qu’elle ne connait pas, j’ai aussi appris que l’amie à qui elle parlait était enceinte. Ca m’a fait sourire et je me suis retenue d’aller lui taper sur l’épaule et lui proposer de lui raconter les péripéties du mien de mariage! (si elle se reconnaît, j’espère qu’elle ne se sentira pas offensée, mais sinon elle saura ainsi qu’on croise des francophones partout et que l’emploi du français n’est pas un gage de discrétion)

Certains me diront que je n’ai qu’à faire comme tout le monde et me coller un IPod sur les oreilles lors de mes pérégrinations mais j’avoue que regarder le monde vivre par le petit bout de la lorgnette m’amuse énormément. Les gens m’agacent un peu lorsqu’ils racontent leur vie sexuelle avec les mouches ou énumèrent leur liste de courses au téléphone, bien fort, pour en faire profiter tout le monde. Mais sinon c’est souvent assez amusant, parfois attendrissant. L’observateur curieux ne s’ennuie jamais à bord des transports et c’est parfois l’occasion de rencontres cocasses comme cette vieille dame de 85 ans qui revenait de Cypress et qui m’a raconté tout sa vie et donné tous les tuyaux pour aller faire des raquettes autour de Vancouver.

Les chauffeurs de bus en ont des choses à raconter lorsqu’on les interroge. Ils vivent de belles histoires et aussi des histoires plus tristes, voire tragiques. Ils acheminent bien plus que des « passagers », ils acheminent un petit morceau de civilisation…


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