lundi 11 octobre 2010

Cap au Nord: Yellowknife, Territoires du Nord-Ouest - Episode 2: des mines et des aurores boréales

Les Territoires du Nord-Ouest ont une économie assez peu diversifiée. Une grosse partie des revenus du territoire provient de l'extraction minière (or, diamant et autres minerais) et de l'extraction des hydrocarbures et du gaz naturel. Pas vraiment des ressources durables il faut dire... Le problème auquel font face les populations des territoires c'est l'abandon des mines et la pollution provoquée par des méthodes d'exploitation bien peu écologiques... La mine Giant, à quelques minutes de Yellowknife en est un exemple flagrant. Ce site, abandonné du jour au lendemain par la compagnie exploitante, est un réservoir d'arsenic. Aujourd'hui, le site est en cours d'assainissement par le gouvernement et sera à terme transformé en musée et en zone récréative pour les amateurs de skydoo et de quads... Nous avons eu la chance de pouvoir visiter le site avec l'ingénieur en charge du projet de nettoyage. Il va tester une technique unique au monde: ils vont expédier tous les résidus d'arsenic dans des chambres souterraines qui seront ensuite gelé à très basse température pour les sceller. L'ingénieur a aussi pu nous confier ses craintes quand au nettoyage de sites infiniment plus vastes et pollués que celui-ci, comme les exploitations de sable bitumineux en Alberta....

 
 
 Anciens bassins de décantation contaminés à l'arsenic
 
 
 
 La structure qui permettait de faire descendre les mineurs jusqu'à 1200 mètres sous terre et remonter le minerai d'or...

La mine Giant a marqué les esprits à Yellowknife après un tragique évènement où un gréviste a fait sauter un wagon de la mine et tué 9 mineurs. L'homme a ensuite été poursuivi et condamné mais le site reste un endroit assez lugubre à visiter...Les paysages lunaires laissés par l'exploitation du sous-sol sont désolés et tristes, mais ils font partie de la réalité des gens des territoires.


Après cette visite, nous avons repris le bus pour aller visiter la communauté de Dettah, un village Déné. Dettah se trouve à environ 6km de Yellowknife l'hiver, quand la route de glace permet de conduire sur le lac gelé. en cette saison la route est fermée:



Nous avons donc du faire environ 35 kilomètres par la route traditionnelle avant d'atteindre ce petit village dont les habitants ont donné leur nom à la ville de Yellowknife, ce sont des Yellowknives Déné. Déné veut dire "peuple" ou homme. Cette tribu particulière était connue autrefois pour fabriquer des outils en cuivre, d'où ce nom de "Yellow knives", les couteaux jaunes. La langue des Déné est très proche de celle parlée par les Navajos et par certaines tribus Apaches. Les descendants de ces chasseurs-cueilleurs sont aujourd'hui majoritairement convertis au catholicisme: 




 les Déné sont un des peuples autochtones des Territoires du Nord-Ouest qui cherchent actuellement à obtenir leur autonomie gouvernementale. Comme beaucoup de peuples autochtones, ils souffrent encore beaucoup des dégats provoqués par la tentative d'assimilation forcé par les écoles résidentielles et les anciens parlent volontiers de cette "génération perdue" qui doit réapprendre les liens sociaux et communautaires. Les Déné sont aussi beaucoup affecté par la pauvreté rampante qui affecte les communautés isolés. Le monde moderne s'affronte avec le monde traditionnel. Les dirigeants Déné, comme ceux des Tlicho, des Gwichin ou des Inuvialuit, prennent cependant le taureau par les cornes et tentent de faire la synergie entre ces deux mondes. Lors de notre visite de Dettah, le Chef Sangris nous a longuement parlé des problèmes de santé auxquels de plus en plus de jeunes font face, notamment le diabète. Pour contrer les effets dévastateurs des sucres rafinés des produits à bas prix du supermarché, les anciens ont décidé d'initier les jeunes aux produits traditionnellement consommés, comme le caribou, le poisson d'eau douce ou les produits de la cueillette. Ils ont partagé avec nous un ragout traditionnel de caribou avant que les jeunes nous fassent une démonstration de jeux de mains. Les anciens veulent que ces jeunes gardent une fierté de leur héritage culturel et tentent de conserver ces traditions tout en poussant leurs jeunes à étudier et voyager pour acquérir le savoir dont ils auront besoin pour aider leur communauté à atteindre l'autonomie gouvernementale. Tout est loin d'être rose pourtant et les problèmes liés à la consommation d'alcool et de drogue sont visibles partout... Ils ont pourtant pris le temps de nous accueillir avec une hospitalité extraordinaire. Mes étudiants m'ont avoué avoir passé une après-midi qui restera dans leurs mémoires. 


 
 

Parmi mes étudiants se trouve un représentant de la Nation N’laka’pamux de BC. Il avait apporté une couverture traditionnelle de BC à offrir en remerciement à nos hôtes. Le Chef Sangris a été très touchée par cette attention et nous a dit qu'il espérait que notre étudiant serait un modèle pour ses jeunes, leur prouvant qu'on peut être résolument moderne (cet étudiant a fondé une des premières agences d'évaluation environnementale autochtone en BC...) tout en gardant son héritage culturel.


 
 
 Après cette visite, notre étudiant de Yellowknife nous avait organisé un diner sur les bords du lac, avec du poisson séché traditionnel Gwich'in, du poisson frais frit, pêché par ses soins et du rôti de caribou aux canneberges avec des fèves au sirop d'érable, le tout accompagné de l'inévitable Bannock. Un régal !

 
 Poisson séché traditionnel Gwich'in
 Le pain bannock!
 Votre serviteur, aidant à préparer le poisson
 Un des conseillers du programme aidant à couper le bois pour le poëlle à bois.
 Nos hôtes faisant frire le poisson frais
 Les étudiants, faisant cuire les fèves à l'érable sur le poëlle à bois
Miam miam !! Rôti de caribou et poisson frit.

Après ce repas des plus copieux, j'avais vraiment besoin de me dégourdir les jambes. Je suis partie marcher le long des collines basaltiques qui bordent le lac pour admirer en paix la nuit polaire. Assise sur les rochers, j'ai soudain entendu un bruit de respiration à côté de moi et quelle ne fut pas ma surprise de découvrir un minuscule renard arctique, tranquillement assis à côté de moi! Ce petit animal est resté bien 10 minutes à côté de moi qui n'osait presque pas respirer de peur de l'effrayer... 

 Il ressemblait un peu à celui-ci, photo de adavies sur Flickr

Mais la magie du Nord ne devait pas s'arrêter là... Quelques heures plus tard, les premières lueurs d'une aurore boréale ont fait leur apparition. J'ai passé les deux prochaines heures le nez en l'air, à admirer le ballet de la lumière dans le ciel. Sans mon pied, j'ai tenté de capturer un peu de la magie avec mon appareil photo mais les photos ne rendent pas justice à ce phénomène naturel spectaculaire:

 
 
 

Yellowknife se trouve au centre de l'ovale aurorale, c'est sans doute l'un des meilleurs endroits au monde pour observer ce phénomène. J'avoue que cette dernière nuit à Yellowknife m'a bien donné envie d'aller vivre quelques temps dans le Nord... En attendant, je pense bien y retourner en Mars, lorsque tout sera gelé pour aller faire ma touriste ici:


Le lendemain, il ne me restait que peu de temps avant de reprendre mon avion pour Vancouver, j'ai à peine eu le temps de refaire un petit tour dans le "Old Town" et d'aller acheter quelques petits cadeaux pour mes hommes, ainsi qu'une petite sculpture Inuit pour ma (maigre) collection.

 
 
 
 Le monument dédié aux pilotes de brousse dans le Nord, au sommet de la ville

 Un des hauts-lieux de la vie nocturne de Yellowknife: le Wildcat Café, ouvert seulement l'été (il n'y a pas de chauffage à l'intérieur...)

1 commentaires:

Nicolas a dit…

Epatant séjour à Yellowknife. J'aime particulièrement la soirée avec le renard et la nuit magique qui a suivi. Si seulement le renard avait été là à tes côtés pendant l'observation de l'aurore boréale, le rêveur que je suis se serait plu à formuler une hypothèse féerique: un magicien qui serait lui-même un grand rêveur et un amoureux de la nature aurait pris l'apparence de ce renard cette nuit-là, et ainsi la ruse aurait été double, car d'une part, la proximité insolite du renard aurait rendu encore plus magique la contemplation de l'aurore boréale, et d'autre part, cet enchanteur rusé (caché donc sous l'apparence du renard) n'aurait alors eu rien de moins que le très joyeux privilège de partager avec toi les émotions (et les sensations quasi-épidermiques associées) de ces instants très magiques. :-) ... Elucubration féerique rédigée sans aucun dogme ni retenue, en écoutant des échos baignés de poésie et d'horizons méconnus... :-) Mais le renard n'est pas venu observer l'aurore boréale à tes côtés, alors trêve de bla-bla!... Le séjour que tu nous racontes là, avec pour points d'orgue ce renard et cette aurore boréale, a quand-même des airs de conte de fées. Merci à toi de l'avoir partagé.

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